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Critiques

L'Evangile du Bourreau, d'Arkadi et Gueorgui Vaïner

Evangilebourreau   Il a suffi d’une menace voilée pour replonger Pavel dans ses souvenirs des services spéciaux, la belle époque où il travaillait encore pour le Saint Patron, le grand Josef Staline en personne. Il allait falloir bien de la patience aux pauvres aspirants justiciers qui voulaient le faire répondre de ses actes : des banals assassinats de rivaux politiques à la mise en scène du complot des blouses blanches, les occasions de servir le Parti n’avaient pas manquées dans cette Russie Stalinienne où l’on n’était jamais assez paranoïaque. En nous entrainant dans les souvenirs d’un «bourreau» plus opportuniste que fanatique, les frères Vaïner décortiquent l’impitoyable machine Stalinienne, son quotidien et son absurdité autant que ses incroyables accès de cruauté. On pourrait, pour se rassurer, parler d’inhumanité : mais ce que nous prouve une fois de plus ce roman, qui a l’intelligence de ne jamais tomber dans le manichéisme, c’est que ces actes terribles n’étaient ni décidés ni exécutés par des monstres mais bien par des êtres humains avec des sentiments, des émotions, des amis, une famille. Des gens, tout simplement. Et peut-être est-ce encore plus terrifiant.

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Le Crépuscule des Stars, de Robert Bloch

Gloire1   Nous sommes au début des années 20, et les quelques illuminés qui avaient fui New York pour un coin perdu de Californie surnommé Hollywood expérimentent, bricolent, créent, mettent en scène, écrivent, jouent. Bientôt victimes de leur succès, la lente et insidieuse transition vers une véritable industrie cinématographique va inexorablement impacter leurs visions et leurs rêves...

  En nous attachant aux pas de la petite troupe qui gravite autour des studios Coronet, Robert Bloch arrive parfaitement à nous faire ressentir le bouillonnement, l'espoir, la vie de toute une époque, et cela sans en faire des tonnes ni nous noyer sous les anecdotes. Une intrigue simple, sans fioritures, et qui pourtant imprimera en vous une nostalgie, voire une mélancolie, d'une puissance peu commune.

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Pélagie et le Bouledogue Blanc, de Boris Akounine

Pelagie   «Petite sœur» de l’autre série historique d’Akounine centrée sur l’agent du Tsar Eraste Fandorine, les enquêtes de Pélagie n’ont pas à rougir de la comparaison. Excellents romans d’énigmes à la construction minutieuse et aux meurtres retors à souhait, les trois opus mettant en scène les investigations de l’iconoclaste sœur Pélagie dans la campagne russe de la fin du XIXème se distinguent par leur ton aussi enjoué qu’érudit, les nombreuses digressions et plongées dans l’âme slave, les anecdotes historiques ou triviales... en bref par une générosité débordante, qui pourtant réussit l’exploit de ne pas entraver ni alourdir la progression de l’intrigue principale. On sent que l’auteur se régale à nous conter les tribulations de son attachante héroïne, et son plaisir est communicatif !

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Les Voleurs d'Encre, d'Alfonso Mateo Sagasta

Voleursencre   S’inspirant de faits qui, s’ils paraissent incroyables, n’en sont pas moins avérés (la fausse suite de Don Quichotte et le mystère de son auteur), Mateo Sagasta lance sur la piste d’un simple pseudonyme un ancien soldat reconverti en bras droit d’un redoutable éditeur espagnol aux activités annexes plus ou moins légales. Mais de là à tolérer le plagiat...

  Alternant entre les bas-fonds de Madrid et un milieu littéraire pas forcément plus reluisant, il nous livre une peinture très complète du bouillonnant Siècle d’Or, où l’effervescence artistique côtoie l’instabilité politique. Très noir, voire parfois cruel, et pourtant souvent drôle, ce roman tranche avec les enquêtes historiques habituelles, et ce n’est pas plus mal !

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Le Lecteur de Cadavres, d'Antonio Garrido

Le lecteur de cadavres   Fort d’une passion et d’une documentation impressionnante, Garrido enrichit habilement la trame des enquêtes mouvementées de son héros d’une foule de détails passionnants sur cette Chine du XIIIème siècle, mais sans jamais alourdir son récit pour autant. Car si la résolution de meurtres particulièrement tordus et les balbutiements d’une méthode d’investigation plus scientifique occupent évidemment une grande part du roman, l’auteur (et le lecteur !) s’intéresse tout autant à la vie et à la carrière de l’attachant Ci Song, médecin légiste avant l’heure qui se verra confronté au poids écrasant des traditions séculaires et des puissants parfois corrompus qu’elles soutiennent.

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L'Homme aux Lèvres de Saphir, d'Hervé Le Corre

Hommesaphir   Si les grands travaux d’Haussmann ont fait entrer une bonne partie de la ville dans l’ère moderne, les quartiers les plus populaires de ce Paris dangereusement proche de la chute du Second Empire sont encore gangrénés par la pauvreté, le crime et la prostitution, et Le Corre nous plonge sans ménagement dans cet envers impitoyable de la Ville Lumière, où échouent tous ceux pour qui le rêve de la montée à la Capitale s’est transformé en cauchemar. Et tandis que tueur en série, poètes, syndicalistes, flics et prostituées se croisent dans les bas-fonds de ce Paris monstrueux, aussi corrompu que corrupteur, on frissonne à l’idée que ce Paris de Zola n’a finalement rien à envier en terme de noirceur au Los Angeles d’Ellroy ou au Londres de Robin Cook.

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L'Aliéniste, de Caleb Carr

Killer1   New York, 1896. Un serial killer empile les cadavres, mais ne laisse aucun indice quant à son identité. Aucun indice physique, du moins ; aussi un aliéniste, psychiatre avant l’heure, propose à la police de le traquer en s’appuyant sur des éléments psychologiques...

  L’Aliéniste, c’est une enquête difficile et passionnante, les balbutiements d’une nouvelle criminologie, des personnages intrigants ; c’est aussi et surtout le New York de la fin du XIXème siècle superbement retranscrit, flamboyant et terrifiant, où les beaux quartiers ne sont qu’à quelques rues de l’horreur la plus sordide.

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La Compagnie des Menteurs, de Karen Maitland

Compagniementeurs   Si les colporteurs, magiciens des rues, mendiants ou autres ménestrels qui constituent contre leur gré la bien mal assortie «Compagnie» du titre ne sont pas, contrairement aux «Dix Petits Nègres» d’Agatha Christie qu’ils évoquent irrémédiablement, coupés du monde sur une île abandonnée, la terrible épidémie de Peste qui ravage l’Angleterre autour d’eux ne laisse cependant aucun doute : complètement esseulés dans une campagne vidée de ses habitants, les meurtres qui frappent leur petit groupe sont fatalement l’œuvre de l’un d’entre eux. Mais tous cachent de lourds secrets, et c’est tout autant la découverte du passé de ces personnages ambigus que celle de la vie quotidienne de cette sombre époque qui vont rendre ce roman passionnant, dont l’auteur est en train de devenir une des valeurs sûres du roman historique britannique.

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